L'enfant et le caillou (Conte)
Jean, un enfant de cinq ans, était assis à l'écart, la tête entre les deux mains et regardait des enfants jouer au loin se demandant ce qui le différenciait des autres. Il sentait cette différence jusqu'au tréfonds de lui sans pouvoir la nommer. Il avait tout simplement perdu sa joie de vivre, il était déjà mort à cinq ans.
D'un pas nonchalant, il marchait distraitement le long d'un sentier ne menant nulle part. Entouré d'herbes presque aussi hautes que lui, il crut distinguer au loin un scintillement. Curieux, mais sans hâte, sautant à l'occasion pour mieux apercevoir cette lueur qui semblait disparaître et, soudain, réapparaître, il se fraya un chemin jusqu'à elle.
Stupéfait, n'en croyant pas ses yeux, il aperçut un diamant de la grosseur de son poing.
S'en approchant lentement, comme s'il avait peur qu'il se sauve de lui, les yeux grands ouverts, la bouche bée, il le saisit avec tout le respect dont il était capable. Il s'assit de longues minutes le contemplant avec émerveillement et sentait une chaleur nouvelle montée en lui.
La joie l'emportant, il partit en courant à toutes jambes vers le village tenant bien serré à deux mains la pierre précieuse contre sa poitrine criant à qui voulait bien l'entendre:
"J'ai trouvé un diamant."
Entrant en trombe à la maison, tout haletant, tombant presque aux pieds de sa mère, il dit: "Maman, regarde ce que j'ai trouvé! Regarde! C'est un diamant!"
Sa mère, éclatant de rire, lui répondit:
- "Pauvre Jean. Tu es toujours aussi rêveur. Mais, ce n'est qu'un vulgaire caillou.
- Mais non maman, regarde, regarde encore… c'est un diamant.
- Bon assez, lui répondit-elle. Cesse tes balivernes et va jouer avec tes camarades. "
À ce moment, le père entrait à la maison retournant du travail
- "Papa, regarde ce que j'ai trouvé, dit Jean d'un ton suppliant.
- Ah, le beau caillou, " répondit le père s'affaissant sur sa chaise préférée.
Jean, la mort dans l'âme, n'en croyait pas ses oreilles.
"Qu'ils sont bêtes ces adultes, pensa-t-il, ils ne savent pas reconnaître un vrai diamant."
Ce soir-là, il se coucha avec une douce tristesse, mais résolu à garder sa trouvaille quand même.
Le lendemain, la pierre à la main, il se promena dans son village la montrant aux passants sans dire un mot. Les uns le regardaient distraitement, les autres n'y prêtaient guère attention et d'autres le regardaient avec amusement.
L'air renfrogné, Jean sentait une colère monter, une colère envers lui-même et un embarras, car plus qu'il regardait son diamant, plus qu'il ressemblait à un vieux caillou. N'en pouvant plus, il retourna dans le champ et lança de toutes ses forces la pierre au bout de ses bras.
Cependant, chaque soir, avant de s'endormir, il revoyait son diamant, ce diamant si pur qu'il en sortait une lumière blanche, une lumière qui l'avait réchauffé jusqu'au fonds de son être, qui en l'espace de quelques instants avait soulevé le voile sombre qui enveloppait sa vie et lui avait fait miroiter un monde meilleur.
Les semaines, les mois, les années passèrent et Jean évitait de retourner dans ce sentier qui l'avait amené à sa découverte. Puis, avec le temps, il y retourna sans chercher, ne se souvenant presque plus de cet incident jusqu'au jour où il trébucha sur un gros caillou. En tombant par terre, il entendit des éclats de rire. Un garçon nommé Michel, tentant d'étouffer son rire, lui dit:
- "Tu as trébuché sur mon diamant"
Jean, regardant tour à tour le caillou et le garçon, lui dit hésitant:
- "Mais…ce n'est pas un diamant, …ce n'est qu'un caillou…. "
Michel lui répondit:
- "Tu as cru les autres n'est-ce pas? Eh bien non, c'est un diamant, c'est le mien."
Et toi, as-tu retrouvé le tien?
Robert
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